L’Impureté de Dieu

L'Impureté de Dieu

La lettre et le péché dans la pensée juive
Paru le 31 juillet 1991
ISBN : 2-86645-076-0
Livre en librairie au prix de 19.06 €
240 pages
Collection : Le temps et les mots

L’écriture n'est pas, selon la pensée juive, une fonction humaine : elle fonde l'humanité.
La littérature n'est pas une activité, un art, une profession ni un loisir, mais elle engage le réel en une vaste trame romanesque à décrypter indéfiniment, qui se nomme la Bible.
A rebours de la formule de Lacan : « à l'être succède la lettre », voici l'enseignement majeur du judaïsme: c'est la lettre qui précède l'être ; Dieu, avant que de rugir, d'illuminer ou de sculpter, bien avant de châtier, d'élire, de jalouser ou de disperser, Dieu avant même de créer écrivit.
La tâche primordiale de l'élu sera dès lors de lire, d'étudier, de gloser, de transmettre, d'écrire aussi bien sûr, maniant telle une étoffe - à coups de césures et de sutures - la matière intense, délicate, pulsatile, chatoyante et jouissive des versets, floculations compactes de dire engendrant la pensée aussitôt entrelacés.
Les Docteurs du Talmud ont ainsi édifié une prodigieuse rhapsodie de lections, lectures disloquées et couturées de l'écriture, tout entière réenchevêtrée en un patchwork mobile, éternellement autre. Le texte à peine surgi, se joue donc la question de son altération puisque c'est toujours d'une lettre l'autre que se trame l'écrit.
S'engage alors le processus infini de l'impureté, du mélange, de la souillure et du péché, en un mot de l'immonde.
La faute originelle, fiction vraie du Texte qui l'invente, déclenche - outre le mal, l'imprécation et le châtiment - le désir, la beauté, le discernement, la rédemption, et la pudeur, car dès qu'il se sait nu l'homme se veut vêtir, revenant de la sorte à la pure texture d'un tracé qui le contamine.
 

STÉPHANE ZAGDANSKI est né en 1963, après des études de philosophie et d'hébreu, il a publié plusieurs articles dans Les temps modernes, Lignes et Pardès.