Triangle Bleu
"Un tiers de siècle après sa publication par Pierre Nora chez Gallimard, Triangle bleu - le triangle des républicains espagnols et des anciens des Brigades internationales à Mauthausen - apporte, sur leur survie et leurs combats pour rester des hommes, des informations qu'on ne trouve nulle part ailleurs et auxquelles il n'y a rien à changer.
L'édition de 1969 s'est heurtée à une conspiration du silence voulue par les institutions communistes, mais qui se trouva relayée par les médias ... Sans doute dérangeait-elle les idées admises : à la fois une hagiographie du martyre de la déportation qui tendait à s'établir en réponse aux offensives des négationnistes, mais aussi les prudences dues au sentiment de l'incommunicabilité de ce qui nous avait permis de survivre, sentiment qui allait plutôt s'aggravant. A force qu'on nous demande, avec sous-entendus : comment avez-vous donc fait pour en revenir ? bien des nôtres en avaient conclu que tout n'était pas bon à dire. Les témoins de Triangle bleu ne s'embarrassaient pas de précautions. Leur survie était une infraction à toutes les règles. Ils avaient payé cher le droit de dire ce qu'ils étaient.
Triangle bleu met en lumière que, si le nazisme est le seul régime à porter l'opprobre de l'Holocauste, si la généralisation de sa sauvagerie contre les déportés a sans doute été peu égalée, les atteintes à la dignité de l'homme dans le système de ses camps ne lui ont pas été, hélas, particulières. En 1969, la France ne voulait pas regarder ce passé. Aujourd'hui, du procès Papon à la torture en Algérie, les nouvelles générations entendent en revanche faire la lumière. Triangle bleu leur apporte certaines pistes de réflexion.
Pierre Daix, extraits de la préface."
Préface de Pierre Daix avec la collaboration de Pierre Serrano